La Parasha du mois

Parashat Vayétsé - novembre 2019
Le mot de notre Officiant Elkana Touitou

Ce Shabbat nous gravirons les marches de notre synagogue, et c’est l’une des Parashiot les plus célèbres et l’une des plus représentées que vous aurez le plaisir de (re)découvrir.

L’ouverture de la Parasha se fait avec la révélation de D. à Jacob. Cette révélation initiale à Jacob est comme une prophétie de consécration que nous trouvons aussi chez les prophètes d’Israël ; elle vient le renforcer dans sa mission, lui en faire comprendre plus clairement les intérêts.

Nous savons ce qu’il y avait dans le cœur de Jacob lorsqu'il fut forcé de quitter la maison familiale pour se rendre dans un monde étranger, et d’y trouver peut-être « l’amour ».
Le fils choisi restera-t-il dans la lignée de ses pères Abraham et Isaac?
Dans les paroles de D. ce n’est pas seulement des paroles de bénédictions et de réconfort, mais des allusions claires qui lui disent qu’à sa manière, en poursuivant sa mission, il contribue à l’histoire que ses ancêtres ont déjà commencé, mais que sans lui tout cela pourrait bien prendre fin...

L’avenir du peuple juif repose désormais sur notre héros de la semaine.

Venez assister à la Dracha, vendredi soir.
Chabath Chalom

Parashat Houkat - juin 2018
Le mot de notre Rabbin David Mattis

The parashah this week is Hukkat (Nombres 19:1 -22:1) which covers a number of topics including the death of Miriam and Aaron and Moses’ striking of the stone. Yet it begins with the most enigmatic ritual in Jewish lore: the “red heifer.” The Kohen Gadol / High Priest is instructed to find a “parah adoumah” - literally a red cow, which some translators render more prosaically as “brown cow,” slaughter it, burn it and deposit its ashes on the altar in the Temple in Jerusalem - all in a highly elaborate ritual. Within the context of tame (ritually impure) and tabor (ritually pure) that exists throughout the Torah and Rabbinic literature, this ritual is the single biggest purifier that can purify even those who have contacted a dead human body - which itself is the ultimate impurity.

One of the questions that rabbis get the most in Jewish life is: “why.”
Why kosher?
Why shabbat?
Why circumcision?
Et cetera et cetera.

Maimonides famously declared that he could understand the reason behind every single mitzvah except for that of the para adoumah. Of course, he is working in the framework of a major taxonomy of the mitzvot. By “taxonomy,” I mean the way of subdividing the mitzvoth to understand their characteristics.

The most well-known is that of “positive” and “negative” - that is in the King James Bible the “thou shall”s and “thou shalt not”s. But that is only one way to divide the commandments. There is also “time-bound” and “timeless,” group and individual, and one’s you need an object for and ones that only require words.

One of the taxonomies employed by our Sages is that of “Houkkim” and “Mishpatim.” Although both words can be translated as “laws,” (in English we like to use synonyms like “laws and edicts,” or in French “des lois et des statuts)” they have difference senses.
Mishpat comes from the root שׁ פ ט  which means to judge.  Therefore it is a sentence or a judgement that humanity would have figured out on their own such as the interdictions against murder and theft.
Hukkim is rooted in the word ח ק ק, which means to carve in stone.  In other words, it is declared, carved in stone and unknowable, such as kosher food or the prohibition mixing wool and linen.
All religions have both aspects because ultimately we humans are not entirely rational.  We cannot simply reason our way through life; we also must intuit and trust. Our tradition is well aware of this  and is one of the secrets to Jewish continuity,

For further reading on this, the book THE BOY ON THE DOOR ON THE OX by Rabbi Samuel Martin Cohen is a fascinating and strangely personal take on tame and tahor in our tradition.


Parashat Va-Yiqra - mars 2018
Le mot de notre Rabbin David Mattis

This week, we begin the third book of the Torah- Va-Yiqra , Leviticus, and read the parashah of the same name.

Its very title, which is translated “and [God] called [... to Moses ],” evokes the theme of communication. The verse reads, in French translation, L'Éternel appela Moïse, et lui parla, de la Tente d'assignation, en ces termes.

Our Sages noticed that three verbs of speech are used:
  • va-yiqra “appela” ,
  • va-y’daber “parla” , and
  • l-emor “en ces termes (lit. en disant).”

This invites two conclusions. One, that the Torah reflects different ways of communicating. In our lives we know that the same idea or feeling can be conveyed in a variety of intonations. Imagine the difference between an “I’m sorry” delivered with heartfelt eye contact and one given perfunctorily by a child who was just commanded to apologize.

Two, God and Moses enjoyed a most thorough communication. As the Book of D’varim -
Deuteronomy - explains, il n'a plus paru, en Israël, un prophète tel que Moïse, avec qui le Seigneur avait communiqué face à face. Moses could perceive God’s q’riyah - calling, dibbur - speech, and amirah- talking.

As a corollary to these conclusions, might I suggest that we try to be sensitive to the many ways God communicates to us, and we communicate to each other.


Parashat Toldot - novembre 2017 Le mot de notre Rabbin David Mattis
La parashah de cette semaine s'appelle Toldot mais en fait il y a beaucoup de "toldot" dans la Torah.

Toldot vient de la racine verbal yud-lamed-dalet ( י ל ד ) qui indique " la naissance" [ cf. yaldah - demoiselle, moledet - patrie ].

Toldot, un pluriel donc, signifie donc celles et ceux qui sont nés, c'est-à-dire des "générations. " D'une progéniture biologique, le mot Toldot change son sens pour évoquer le temps qui passe, c'est-à-dire "l'Histoire."
Ces "Toldot" sont utilisées dans la Torah pour encadrer les diverses histoires et nous orienter sur les chemins de la grande histoire des Enfants d'Israël. Si nous regardons les généalogies qui précèdent, nous voyons les étapes bibliques de la famille d'Abraham - nos protagonistes. 
Voici une liste :  - Genèse 5:1 Toldot Adam
- Genèse 10:1 Toldot b'ney Noah
- Genèse 11:27 Toldot Terah ( père D'Abraham)
- Genèse 25:12 Toldot Yishmael ( fils d'Abraham )

et maintenant, 

Genèse 25:19 Toldot Isaac (fils d'Abraham , père de Jacob, et grand-père des douze tribus).

Par cette  méthode,  la Torah nous rappelle notre place au sein du grand récit du peuple juif.


Parashat Behar Beroukotai - mai 2017

Ces 2 parachot sont les dernières du livre du lévitique, du livre de Vayikra.
Le livre de Vayikra est centré sur le chemin vers la sainteté. Le début de ce livre mentionne que son contenu a été donné à Moise dans la Tente du rendez-vous. Or spécifiquement pour ces 2 parachot il est dit qu’elles ont été données sur le mont Sinaï. Pourquoi préciser que ces 2 parachot prononcées dans la Tente du rendez-vous, l’ont été aussi sur le mont Sinaï ?
N’est-ce pas une façon de nous faire réfléchir sur leur importance du projet donné au peuple juif en rapport avec la terre d’Israël ?
Behar Beroukotai parlent de la terre et des modalités des liens entre la terre d’Israël et le peuple d’Israël.
A la lecture de ces 2 parachot, la question du pourquoi Eretz a une telle importance pour le peuple juif reçoit des pistes de réflexions. Ces pistes seront le fil conducteur de cette lecture.
Pour tous les peuples, l’appartenance à une terre ne pose pas de questions. Quelqu'un naît sur une terre elle devient son pays, sa patrie.
Pour le peuple juif il y a d’abord le Sinaï, un no man’s land où il se constitue comme peuple, il y a d’abord une parole à écouter, un projet à mûrir puis après il entre sur la terre qui lui est donnée dans une promesse.
Behar Beroukotai énumère ce que le peuple juif doit faire pour se maintenir sur cette terre de la promesse. Ce qui est demandé au peuple juif en rapport avec Eretz va rendre cette terre absolument singulière.
Avant de faire un gros plan sur le projet présenté aux enfants d’Israël dans ces 2 parachot, élargissons le tableau vers ce qui leur est demandé plus globalement en lien avec Eretz.
Au moment de la récolte, les coins ne doivent pas être moissonnés ils sont pour le pauvre, la veuve, l’orphelin, l’étranger. Quand les gerbes sont rassemblées et que certaines tombent elles ne doivent pas être ramassées, elles sont pour le pauvre, la veuve, l’orphelin, l’étranger.
Sur chaque récolte est prélevé 10% pour les Levi, c’est un salaire pour les dédommager de leur travail puisque les Levi n’ont pas de possessions territoriales.

La terre connait un cycle de 7 années.
  • La 1° 2° 4° 5° année il y a un prélèvement sur la récolte et toute la maison de l’agriculteur monte à Jérusalem pour le consommer dans une ascension géographique qui n’est pas séparée d’une ascension spirituelle.
  • La 3° 6° année, il y a un prélèvement pour les pauvres.

On constate que la jouissance du produit de son travail est autorisée, ce qui est rejeté est l’immédiateté dévorante. Il n’est pas interdit de faire du profit à condition de pas exploiter les ressources de la terre jusqu'à ces dernières limites. Il n’est pas interdit de devenir riche mais à condition de respecter une circulation économique pour permettre une redistribution.

Pour autant ce système qui nous enseigne que l’économie doit se lier à la justice, nous dit aussi autre chose grâce à la notion de térouma. Car en effet sur chaque récolte doit être prélevé la térouma, la dîme, pour le Cohen. Le Levi doit lui aussi prélever la térouma sur ce qui lui versé.   

Or la térouma n’est ni un salaire (contrairement à ce que reçoit le Levi) ni un don (contrairement à ce qui est donné au pauvre). La térouma appartient d’emblée au Cohen. « Hachem parle à Aaron : Moi-même, je te confie le soin de mes prélèvements (téroumati) pour toutes les choses saintes des enfants d’Israël » nombres 18 8. L’agriculteur en payant le Levi, en donnant au pauvre, redirige vers d’autres ce qui lui appartient. Or la térouma ne lui appartient pas, pas plus qu’elle n’appartient au Levi. Ainsi la térouma installe un creux au sein du système des possessions. La térouma, qui peut être concrétisé par un seul grain, fonctionne comme une troué. Ce qui importe n’est pas la quantité, mais la fonction de dessaisissement qu’elle introduit pour ce qui ne peut être aliéné ni par la possession, ni par un don, ni par le versement d’un salaire.  La térouma introduit un lieu vidé de toute maîtrise.

Venons-en maintenant aux règles concernant Eretz énoncées dans Behar Beroukotai.
Tous les 7 ans se produisent 3 éléments essentiels de la vie juive en Eretz : L’arrêt du travail agricole, la rémission des dettes, la libération des esclaves.
  • Tous les 7 ans il y a le Chabath de la terre pour Hachem, la terre n’est pas cultivée et ce qu’elle produit spontanément (céréales, fruits, …) va appartenir à quiconque, au pauvre, à l’étranger, mais aussi aux animaux et aux riches. Ce chabath de la terre qui permet à tous riche comme pauvre, animal sauvage comme animal domestique de se nourrir met en suspend la propriété. Le chabath de la terre rappelle que le seul propriétaire de la terre est Hachem. Un verset de la parachat qualifie le peuple juif de « résident étranger » en Eretz. Le peuple juif peut habiter en Eretz parce que sur cette terre donnée-promise, il y est l’invité.
  • Tous les 7 ans l’esclave est libéré (sauf si il le refuse, dans ce cas il sera inconditionnellement libéré la 50° année), rendant à chacun sa dignité.
  • Tous les 7 ans les dettes sont remises (On parle des dettes contractées par celui qui a subi un coup du sort, pas par celui qui a joué aux courses).

Ainsi la torah nous dit qu’il y a 3 sortes d’aliénations : celle de se vouloir le possédant de la terre, celle de se croire le possesseur d’un autre être humain, et le cercle de domination- soumission entre le créancier et l’endetté.
Ce cycle de 7 ans ouvre à un temps par lequel, les enfants d’Israël ne se contentent pas de comprendre intellectuellement, ni même de croire, mais véritablement de vivre que la terre appartient à Dieu et que les hébreux ne peuvent pas avoir d’autres maîtres que Hachem.

Voilà pour le cycle de 7 ans, mais il y a un autre cycle de 7 X 7 ans. A la fin de la 49° année, précisément le jour de kippour, le shofar est sonné pour annoncer le jubilé, le yovel.

Le yovel reprend les mêmes règles que celles de la 7° année concernant les dettes, la libération des esclaves et le repos de la terre.
Mais en plus le yovel demande que les terres soient remises à leurs premiers propriétaires par délégation, à leurs premiers usufruitiers c’est-à-dire aux 12 tributs qui avaient reçues des parcelles de terre selon le découpage effectué à l’époque de Josué.
Après la destruction du 1° Temple, l’exil à Babylone puis le retour des enfants d’Israël, s’était posée la question de la remise des terres aux 12 tributs. Mais au retour des juifs d’exil leur appartenance à telle ou telle tribut était brouillée. Ce qui rendait problématique de pratiquer le yovel.
Il restait la possibilité du retour des terres à leur véritable propriétaire, Hachem.
Après la destruction du 2° Temple, aucune pratique n’est venue se substituer à la règle du yovel, pour autant nous continuons à l’étudier.
Les versets sur le yovel nous enseignent que la valeur d’un objet, d’un champ par exemple, dépend du moment auquel il est acheté en référence au yovel. Un champ acheté la 47° année sera moins cher qu’un champ acheté la 1° année du cycle de 50 ans. Car celui qui l’achète la 47° année pourra en jouir très peu de temps alors que celui qui l’achète la 1° année pourra en jouir jusqu'au prochain yovel, date où tout est remis à plat pour un nouveau départ.

Le yovel crée un état d'esprit qui nous fait concevoir la valeur des choses non pas en fonction de la spéculation, et de facteurs variables et évanescentes, mais en fonction du temps, d’un terme fixé. Le cycle du yovel nous rappelle que rien ne nous est définitivement acquis.

Après l’éclairage de ces 2 parachot, retournons à la question du début : pourquoi une telle importance de Eretz pour le peuple juif ?

Il y a, bien sûr, la réponse de joie de l’Hatikva : « notre espérance de 2000 ans d’être un peuple libre dans notre pays » mais il y a aussi le projet demandé singulièrement au peuple juif de créer un espace où la présence de Dieu est au cœur du social et de la justice, au cœur de la dignité humaine et du temps. Ce projet se situe dans un espace choisi qui est Eretz Israël. Ceci afin qu'Eretz devienne un gan Israël, un jardin d’Israël comme on dit le jardin d'Eden pour ensuite essaimer vers d'autres pays.

Bibliographie :

  • Pourquoi Israël de Mikhael BENADMON
  • Ethique du jubilé colloque des intellectuels juifs
  • Akadem

Parachat Beha'alotekha
Dracha par le rabbin Rony Klein, Juin 2016
Rabbin Massorti et universitaire

La Paracha de בהעלתך est la troisième du livre de Bamidbar. Il s'agit de comprendre tout d'abord le rôle de ce livre, qui semble rassembler plusieurs motifs très divers, et donc manquer de cohérence. En vérité, son unité doit être appréhendée à travers la structure du camp d'Israël dans le désert. Si l'on regarde attentivement, on s'aperçoit que le livre s'ouvre sur le dénombrement des enfants d'Israël dans le désert, et se referme également sur un dénombrement, à la Paracha de Pinhas. Les enfants d'Israël arrivent devant la terre d'Israël, et ils s'apprêtent à y entrer. Il est très important de le faire dans un certain ordre, qui relève d'une structure très particulière. Cet ordre est à la fois social et politique d'un côté, puisqu'il s'ordonne aux différentes tribus et familles d'Israël, et religieux de l'autre, puisqu'au centre du camp se tiennent les Lévites, chargés du transport du sanctuaire. Cette structure du camp d'Israël est le cadre du livre des Nombres, ou "Dans le désert".

Mais le livre de Bamidbar voit également émerger un certain nombre de récits plus ou moins indépendants, mais qui ont tous trait à la question du pouvoir. En effet, ils mettent en jeu le pouvoir de Moïse face à d'autres sources d'autorité dans le peuple, ou en dehors du peuple. On connaît la fameuse querelle de Qoré et de sa bande contre Moïse, comme le défi lancé par les explorateurs, eux aussi chefs politique, à Moïse. Nous ne pouvons entrer dans le pays. On le lira la semaine prochaine. La paracha de Balak met en scène un prophète des Nations, Bil'am, qui tente, vainement, de s'opposer à Israël. Ici, dans le passage que nous lisons cette semaine, il s'agit essentiellement de l'événement du partage de l'autorité par Moïse. Ce dernier, lassé d'être seul face aux récriminations du peuple, toujours avide de viande et de bonne chair, se plaint à Dieu. C'est alors que ce dernier lui ordonne de réunir 70 personnes parmi les Anciens – Ziknei Israël, ce sont des sages. (Les commentateurs s'interrogent: ce n'est pas la première fois qu'ils apparaissent, puisqu'ils étaient là au Sinaï, comme le dit un verset en Exode 24. Mais ayant manqué de respect envers l'Eternel, Dieu les fit mourir, non au Sinaï, mais plus tard, juste avant la scène qui nous occupe). Dieu "transférera", par un processus d'émanation, l'esprit qui est en Moïse vers ces 70 Anciens, de sorte qu'ils pourront se charger également du fardeau des tâches à accomplir pour le peuple. Cet événement rappelle quelque peu la scène avec Yitro en Exode 18, au moment où son beau-père conseille à Moïse de déléguer le pouvoir de juger à des ministres, de façon à ne pas s'user à la tâche. Toutefois, ici, il ne s'agit pas uniquement de nommer des juges sur le peuple, mais de prendre en charge toutes ses affaires. D'être à l'écoute de ses plaintes, de ses souffrances, et de tenter de les soulager. S'agit-il d'une tâche politique? De la création de la bureaucratie? On pourrait d'abord le croire, mais ici une indication nous laisse suspecter autre chose: les 70 Anciens se mettent soudain, ne serait-ce que l'espace d'un instant, à prophétiser! (le verset dit: va'itnabhou velo yassafou) Avouez que cela ne convient guère à des fonctionnaires tels qu'on les connaît habituellement… Par conséquent, il ne s'agit pas ici de la création d'une bureaucratie, mais plutôt d'un corps politico-religieux de sages – ancêtre du Sanhedrin - capables de prendre en charge les affaires du peuple grâce à leur capacité de se rattacher au don de prophétie. Vous allez dire: ce don de prophétie, c'est une affaire douteuse. Comment savoir qu'un homme est réellement un vrai prophète et non un charlatan? A ce propos, nous avons des critères précis, énoncés au livre de Devarim. Mais ici, le cas est un peu différent: ces 70 Anciens prophétisent bien, mais seulement pour un court laps de temps. Ensuite, ils ne prophétisent plus. En d'autres termes, leur rôle est plutôt d'être des sages certes rattachés à l'inspiration prophétique, mais surtout capables, du fait de leur expérience et de leur sagesse dérivée de la Torah, de résoudre des problèmes pratiques survenant dans la vie du peuple. Ils sont les ancêtres des Rabbanim, des Maîtres du Talmud, qui ne se considèrent plus comme prophètes, mais comme des "sages – hakhamim". Ils exercent une raison inspirée par le don de prophétie, mais ne sont plus des prophètes au sens où ils n'entendent plus directement la parole divine.

Ce moment est donc absolument fondateur: il établit l'institution des Maîtres en Israël. Bien sûr, Moïse est le premier des maîtres, mais Moïse a un statut unique. Il est d'abord le maître qui se tient au-dessus de tous les autres maîtres, puisqu'il nous transporte la Torah du haut du Mont Sinaï. Mais surtout, Moïse est, non seulement un maître, mais un prophète, et le plus grand des prophètes à en croire Maïmonide. Le maître n'est pas un prophète, il s'inspire certes de l'esprit du Sinaï, mais il n'a pas reçu cet Esprit directement. Il doit exercer son intelligence pour accéder à cet esprit. Il raisonne, et en ce sens, c'est un homme des Lumières avant la lettre. Et surtout, la naissance de l'institution des Maîtres ici indique la dimension plurielle de la maîtrise. Comme les Anciens sont 70 – nombre typologique qui indique la pluralité, comme les 70 Nations - il y a nécessairement une pluralité de maîtres. Il ne saurait y en avoir qu'un seul. Chacun en Israël doit se choisir son maître (Assé lekha Rav, disent les Maximes des Pères), celui qui lui parlera à lui personnellement, comme Dieu a parlé à chacun personnellement au Sinaï. Mon maître est celui qui me donnera la Torah sur la bouche, comme on dit que la Torah orale, c'est la Torah qui se trouve "sur la bouche –che be'al pé".

L'Occident moderne s'est rebellé contre les maîtres. Tenant l'homme pour un être capable de penser par lui-même, et l'autorité comme mauvaise en tant que telle, il n'a voulu voir dans les maîtres que des oppresseurs, des petits tyrans qui privent les hommes de leur liberté de penser. Forcément, l'Occident catholique, façonné par une religion dogmatique, ne pouvait concevoir les maîtres autrement que comme des curés qui nous font ânonner des dogmes, sans aucune prétention à la pensée personnelle. Alors que la figure juive du maître, qui naît ici, se dit à l'inverse à travers cet être qui m'éveille à moi-même, qui me fait découvrir la pensée comme ma propre pensée, qui me donne la Torah comme ma Torah. Je dois reconnaître que mon premier professeur de philosophie, en Terminale, personnifiait ce type de maître, et que je lui dois énormément. Preuve que l'Occident n'a pas totalement oublié l'art de ce qu'est un maître.

Mais c'est là un cas particulier malheureusement trop exceptionnel. L'Occident voit en général dans le maître une figure politique, un homme qui, du fait de son savoir, détient une position d'autorité et exerce un pouvoir sur les autres. Malheureusement, en Israël, l'institution du Rabbinat est calquée sur ce modèle politique, et s'est rendue détestable pour les mêmes raisons. Mais il faut revenir à l'essentiel, consigné ici dans notre Paracha: le maître, ou plutôt les maîtres, ne sont pas une figure politique au sens étroit de celui qui détient un pouvoir. Ils sont au service de deux choses: de la vérité de l'Enseignement, qu'ils ont pout charge de transmettre à chaque-un, et du peuple, au sens où leur savoir de la Torah est destiné à les aider dans leur mission de servir le peuple, de l'aider dans sa vie quotidienne. En ce sens-là, ce sont des fonctionnaires,  au sens où ils sont responsables du service public. Reste que ces fonctionnaires sont très différents, à l'opposé même de la figure moderne du serviteur de l'Etat. Le fonctionnaire d'Israël ne sert pas "l'Etat", idole moderne de l'occident, mais le peuple lui-même dans l'infinie diversité de ses singularités. Il ne considère pas les hommes comme des citoyens sans identité d'un espace politique abstrait, citoyens dont il faut "résoudre" les problèmes par les moyens de l'administration. Le fonctionnaire d'Israël, s'il nous fait employer ce terme dans un sens élevé, considère chaque-un en propre, il le tient pour une personne qu'il regarde en face, dans ses problèmes concrets et sa souffrance individuelle. Sans ce regard personnel et le souci du visage de l'autre, il n'y a ni sage, ni maître, ni rav en Israël. Cette assemblée de sages dessine donc le contour d'une anti-bureaucratie au sens moderne. Jamais ils ne doivent se constituer en caste ou en classe à part. Leur élection est comparable à celle d'Israël dans son ensemble: comme Israël est élu pour servir les Nations du monde, les Anciens sont distingués pour servir le peuple d'Israël. Leur savoir ne leur confère aucun privilège, mais tout le poids d'une responsabilité infinie.  



Parachat Yitro
Dracha par le rabbin Rony Klein
Rabbin Massorti et universitaire

La paracha de Yitro se situe au centre de la narration biblique. Les enfants d'Israël, qui viennent de sortir d'Egypte et de traverser la Mer des Joncs, arrivent au pied de la montagne du Sinaï pour y recevoir la Torah. Cet épisode, qui n'avait pas été mentionné dans le "programme" annoncé par Dieu à Moïse, va devenir l'événement fondateur du peuple juif, le lieu et le moment de sa naissance véritable. C'est ici qu'il acquiert son identité.
Si cet épisode est très connu, on prête en général moins d'attention à la première partie de la Paracha, au chapitre 18. Pourtant, il y a ici un récit étonnamment instructif quant au rapport d'Israël au politique et au social. De quoi s'agit-il?

Yitro arrive dans le campement d'Israël qui vient de sortir d'Egypte. Yitro, rappelons-le, est le beau-père de Moïse. Tsipora, sa fille, est la femme de Moïse. Il n'avait pas participé à la Sortie d'Egypte, et ayant entendu parler de cet événement extraordinaire, il vient féliciter Moïse et dire au peuple d'Israël sa solidarité. Pourtant sa visite sera de courte durée: il ne restera qu'un moment près du peuple, puis repartira chez lui. L'objet du chapitre 18 nous donne le récit de sa visite. Or, que fait-il? L'essentiel du récit est consacré à sa principale activité: il se fait conseiller de Moïse en matière politique.
Suivons le texte biblique:
"Le lendemain, Moïse s'assit pour rendre la justice au peuple; le peuple se tint debout autour de Moïse, du matin jusqu'au soir. Le beau-père de Moïse, voyant comme il procédait à l'égard du peuple, lui dit: "Que signifie ta façon d'agir envers ce peuple? Pourquoi sièges-tu seul, et tout le monde stationne-t-il autour de toi du matin au soir?
Yitro s'étonne: Moïse veut-il s'user? Ne comprend-il pas l'art du politique, qui consiste à déléguer le pouvoir, à le distribuer? Aussi son conseil découle de son étonnement. Il poursuit:
"Le procédé que tu emploies n'est pas bon. Tu succomberas certainement… car la tâche est trop lourde pour toi, tu ne saurais l'accomplir seul. Or, écoute ma voix… Représente, toi seul, le peuple vis-à-vis de Dieu, en exposant les litiges au Seigneur. Notifie-leur également les lois et les doctrines, instruis-les de la voie qu'ils ont à suivre et de la conduite qu'ils doivent tenir. Mais de ton côté, choisis entre tout le peuple des hommes éminents, amis de la vérité, ennemis du lucre, et place-les à leur tête comme chiliarques, centurions, cinquanteniers et décurions. Ils jugeront le peuple en permanence; et alors, toute affaire grave, ils te la soumettront, tandis qu'ils décideront eux-mêmes des questions peu importantes. Ils te soulageront ainsi en partageant ton fardeau."

Ce que fait Yitro est judicieux, il parle par la voix du bon sens et de la raison la plus utilitaire, qui sera celle de la raison occidentale. Il dit à Moïse: tu ne peux assumer l'activité de juge uniquement par toi-même. Tu dois nommer des aides, des juges. En d'autres termes,Yitro invente l'administration, et la division du pouvoir. Il dit à Moïse: tu ne dois pas juger de chaque affaire, mais seulement indiquer au peuple la voie à suivre, de manière très générale. Il s'agit des "lois" et des "doctrines", à savoir d'une théorie générale. Quant à la pratique de la justice, laisse-la à des délégués. Seules les affaires les plus graves te reviendront. Or, jusqu'ici, Moïse refusait de se laisser seconder dans sa tâche de juge et de dirigeant. Est-ce par amour du pouvoir? Par désir d'être seul au sommet? Cela ne convient à celui dont on nous dit qu'il "est le plus humble des hommes."! Le texte nous donne une indication très précise sur les raisons de Moïse:
"Moïse répondit à son beau-père: c'est que le peuple vient à moi pour consulter le Seigneur. Lorsqu'ils ont une affaire, elle m'est soumise; alors, je prononce entre l'homme et son prochain, et je fais connaître les décrets du Seigneur et ses instructions."
Passage étonnant: Moïse veut juger pour voir le visage de chacun, puisqu'il juge "entre l'homme et son prochain" (beinichoubeinre'e'ou)! Il veut résoudre les conflits au cas par cas, être à l'écoute de chaque différend, et parler aux gens de manière individuelle. Ce passage résonne puissamment à des oreilles formées au dire de Lévinas. Moïse est cet homme qui veut voir le visage d'autrui, qui ne veut pas être un bureaucrate réglant les affaires du haut de son bureau anonyme de fonctionnaire qui ne fait qu'apposer sa signature en bas d'un formulaire. Moïse, c'est l'anti-fonctionnaire! C'est le juge qui va sur le terrain, regarde chacun en face, et considère chaque conflit comme une histoire personnelle qui le touche au cœur de son être intime. On se souvient de ce Midrach, qui nous racontait comment Moïse berger suivait chaque mouton de son pâturage, et se souciait de chacun d'eux. Ici, c'est le même cas de figure: il regarde chaque homme dans les yeux, pas du haut d'un bureau de fonctionnaire.

Pourtant, répétons-le: le conseil de Yitro est judicieux: d'un point de vue pratique, il a raison. Pour des questions logistiques évidentes, Moïse ne peut pas traiter toutes les affaires à lui seul, il s'userait bien vite. Il faut donc nommer des aides, ces juges qui vont travailler à sa place. "Moïse écouta l'avis de son beau-père". Plus tard, au livre des Nombres, la politique d'Israël apparaîtra véritablement, de manière plus complexe, de la division d'Israël en tribus, au centre desquelles se tiennent les Lévites, et de l'émanation du pouvoir prophétique de Moïse aux 70 sages. Mais ici, juste après la sortie d'Egypte, la bureaucratie est née, sur les instigations de Yitro, juste avant le don de la Torah. Yitro tient déjà le langage de la rationalité occidentale. Cette rationalité nous commande, pour le bien de la société, pour sa bonne organisation, de répartir les tâches, de diviser le pouvoir entre dirigeants siégeant au sommet et dirigeants locaux, subalternes. La hiérarchie du pouvoir est née. Pourtant, il y a un danger dans l'ordre administratif: le danger que le fonctionnaire, qui est nommé et élevé au-dessus du peuple – surtout s'il est "haut-fonctionnaire" - finisse par être indifférent au peuple. Ce danger est même plus qu'un danger: nous savons qu'il est de l'essence du fonctionnaire, de n'importe quel fonctionnaire, d'être indifférent au peuple, qu'il est lui-même usé par un travail auquel il a du mal à trouver un sens, tant il est harassant. Alors que Moïse, lui, n'était pas usé! Car il aimait ce peuple, malgré l'ingratitude de ce dernier… Quant au fonctionnaire moderne,il est si usé et indifférent que lorsque nous "tombons" sur un fonctionnaire zélé, qui semble s'intéresser à notre cas, nous sommes infiniment surpris.

Mais les choses sont encore bien plus graves: le 20e siècle a prouvé le caractère meurtrier de la bureaucratie. Ce sont des fonctionnaires qui réglaient le sort de millions de gens, leur vie et bien souvent leur mort. Tous les régimes les plus sanglants du siècle se sont appuyés sur une classe de fonctionnaires très puissante. Kafka fut le romancier par excellence de la bureaucratie dans son absurdité et son inhumanité. Par conséquent, nous avons appris à nous méfier des fonctionnaires et de la bureaucratie. Nous n'avons plus la naïve confiance de Yitro.

Pourtant, il faut souligner que ce dernier n'avait que des bonnes intentions. Plus même: malgré son caractère dangereux, il faut une bureaucratie, surtout dans des Etats modernes, qui doivent gérer la vie de millions de gens. Dans les termes de Lévinas: il faut la justice, qui procède au calcul, à la comparaison entre les citoyens, même si ces derniers restent rester, en dernier ressort, des entités absolument incomparables. Pourtant, cette nécessité doit également tenir compte de ses dérives presque inévitables. Les modernes ont pris conscience de ces dérives. On parle alors de décentralisation, de délégation du pouvoir aux autorités locales. Mais nous serons toujours loin de l'idéal de Moïse, qui juge chacun individuellement, à même sa souffrance personnelle. C'est le plus haut idéal du dirigeant politique, qui précisément n'est pas un dirigeant politique au sens où nous le connaissons. Moïse comme dirigeant se sacrifie aux autres, il s'oublie lui-même, son propre intérêt, qui est de ne pas s'user lui-même face aux soucis des autres. C'est aussi un dirigeant qui se sent responsable devant chacun, capable de supporter le regard de chacun. La responsabilité est ici porté à son point culminant. Puissions-nous avoir des dirigeants qui s'inspirent ne serait-ce que de loin d'un tel idéal. L'état de nos sociétés, assurément, ne serait pas le même…


Parachat Lekh-Lekha

La paracha Lekh-Lekha s'ouvre par l'ordre de Dieu à Abram : "Pars pour toi, de ton pays, de ton lieu natal et de la maison paternelle, et va vers le pays que je te montrerai". (Genèse 12:1)

Dans cette paracha et dans les autres sections de la Torah où il est question d'Abram (qui deviendra Abraham), ce dernier est souvent conduit à migrer. Dans ce sens, il est peut être l'un des plus anciens migrants.

Au départ il migre pour une raison "religieuse" quand Dieu lui ordonne de se rendre vers la terre qu'Il lui montrera. Par la suite, il doit quitter cette terre pour fuir la famine et se rendre en Egypte. On peut alors dire qu'il est un migrant économique.

A l'heure de la mondialisation, les migrations sont toujours d'actualité: que ce soit les réfugiés qui fuient la guerre civile ou des expatriés qui reçoivent une offre de travail loin de leur lieu de leur naissance. Migrer, changer de pays, est toujours une expérience qui transforme l'être humain. Dans ce sens, l'histoire d'Abram/Abraham nous parle encore au XXI siècle.


Parachat Behar-Behukotai

Cette semaine nous lisons la paracha double Behar-Behukotai.

Le chiffre 7 est l'un des plus importants dans le judaïsme. (On peut dire que tous les nombres ont de l’importance, mais quelques-uns ont une signification spéciale).  Il représente le chabbat et ainsi la Création.
           
Le Chabbat est un cycle de 7 jours, dont le septième est le plus important. Dans la paracha Behar, on parle d’un cycle de 7 ans, dont le septième est le plus important. Comme on travaille pendant six jours et que l'on se repose le septième, exactement comme cela fonctionne le cycle de 7 ans.

Mais dans ce cas, il ne s’agit pas de nous et de notre labeur, mais de la terre et de son œuvre : « Pendant la septième année, la terre aura un chabbat des chabbats [c’est à dire un repos complet], un chabbat pour l'Eternel. Tu ne sèmeras pas ton champs; tu ne tailleras pas ta vigne» (Lev. 25:4). On peut manger pendant la septième année ce que la terre produit naturellement par elle-même.

Cela s’appelle l’année de chmita (relâche). Il y a aussi une période sabbatique de sept fois sept ans, donc 49 ans. La cinquantième année est celle de Yovel (Jubilé). Tous les terrains immobiliers achetés reviennent alors à leur propriétaire d’origine. 

Dans la parach Behukotai, on perçoit un écho du deuxième paragraphe du Chema Yisraël: si l’on ne fait pas ce que Dieu nous dit, ce ne sera pas bon. Il y a une longue liste des punitions (Lev. 26:14-45), tellement sévères qu'elles s'appellent des Tohahot (malédictions).
Mais finalement Dieu se souvient de son alliance avec Jacob, Isaac et Avraham (26:42).

Parce qu’il y a 54 parachayot dans la Tora, mais qu'il n’y a pas autant de semaines dans une année ordinaire (et aussi parce qu’on perd de temps en temps quelques semaines quand on lit une paracha spéciale pour une fête à la place de la paracha de la semaine), il faut lire quelquefois deux parachayot ensemble afin de pouvoir finir la Tora complète le jour de Simcha Tora. En général on prend deux parachayot assez courtes pour ne pas avoir une lecture trop longue. C’est le cas pour nous cette semaine.  

Behar et Behukotai sont les dernières parachayot dans le Livre du Lévitique. Selon le minhag (la tradition), on se lève pour le dernier verset. Ensuite, la communauté dit «Hazaq Hazaq v’nithazek» ( « sois fort, sois fort, et nous serons forts!»), et je répète ces mots.


Parashat Vayikra 


Aujourd’hui on lit la paraschat Vayikra, c’est la première paracha dans le 3e livre de la Tora, qui a le même nom, Sefer Vayikra. Mais ce n’est pas un Shabbat ordinaire cette semaine. Aujourd’hui est aussi Shabbat Rosh Chodesh Nissan et Shabbat ha-Chodesh.

Qu’est ce que cela veut dire? Chodesh, c’est le «mois» en hébreu. Rosh Chodesh, c’est le commencement, littéralement la tête, du nouveau mois (cette phrase est semblable à Rosh Hashana). Shabbat Rosh Chodesh veut dire que le mois commence le Shabbat. Nissan est le nom du mois. C’est le premier mois dans le calendrier juif. Certes, l’an juif commence avec le mois de Tishri en automne, mais cependant, on considère tishri comme le septième mois. Nissan est un mois très important parce que c’est le mois de Pessach.

Et Shabbat ha-Chodesh? C’est un des quatre shabbatot spéciaux qui ont lieu dans les semaines avant Pessach. Il s’agit de l’arrivée du printemps et des fêtes du printemps. Le premier, Shabbat Sh’kalim (shabbat des shekels), commémore l’impôt ancien et les dons au temple.

Shabbat Zachor (shabbat de la mémoire) nous rappelle que Purim vient.

Shabbat Para (shabbat de la vache) raconte l’histoire d’un rite ancien de la purification. Il s’appelle shabbat de la vache parce qu’on s’est servi des cendres d’une vache rouge.

Et finalement Shabbat ha-Chodesh nous dit que le mois de Pessach est arrivé. Pessach a lieu à la veille du 15e Nissan, quand la lune est pleine. C'est-à-dire qu’il ne nous reste que deux semaines avant Pessach!

Chacun de ces shabbatot a une lecture spéciale dans la Tora. Rosh Chodesh en a une aussi. C’est à dire que nous avons deux lectures supplémentaires aujourd’hui dans la Tora -- ou que nous aurions deux lectures supplémentaires si nous avions trois sifrei Tora (rouleaux de Tora). Oui, il y a quelques occasions quand on prend trois Torah pour lire des passages dans des parties diverses du rouleau.

Alors, c’est aujourd’hui un shabbat extraordinaire: Shabbat Vayikra, Shabbat ha-Chodesh et Shabbat Rosh Chodesh Nissan. Il y a aussi une haftara spécial, un mussaf spécial, et un Hallel. On se congratule non seulement avec Shabbat shalom, mais aussi avec Chodesh tov, en se souhaitant un bon mois.


Parashat Jitro

On lit dans le Nouveau Testament: « Car désormais cinq dans une maison seront divisés…., la belle-mère contre la belle-fille et la belle-fille contre la belle-mère» (Luc 12:52-53). Notre Parasha pour cette semaine raconte une histoire très différente: le personnage principal est Jithro, le beau-père de Moïse. Moïse et Jithro ne sont pas divisés. Il ne se dispute pas l’un avec l’autre.

Au contraire, Jithro estime Moïse et son travail, et Dieu aussi. Il l’aide, en lui conseillant de garder la santé. C’est à dire que Jithro voit que tous viennent à Moïse et que Moïse rend des jugements pour eux. Jithro lui conseille de prendre des assistants. S’il y a des demandes plus difficiles, on peut les poser à Moïse, mais les 'affaires' normales peuvent être déléguées aux assistants.

Cette parasha inclut une rubrique très importante : les Dix Commandements. Dans sa première version. La deuxième version se trouve dans le Livre du Deutéronome. Quelles sont les différences entre les deux versions? Il s’agit de détails. Par exemple, on lit dans Exode (20:8): «Souviens-toi du jour du repos, pour le sanctifier» En Deutéronome 5:12 on lit: «Observe le jour du repos, pour le sanctifier....».

C’est la raison pour laquelle on chante dans Lecha Dodi: «‘Observe’ et ’souviens-toi’ en une seule parole.» Lecha Dodi nous donne toutes les deux versions et nous relate l’idée rabbinique que Dieu avait prononcé les deux versions à la fois, comme s'il s'exprimait avec une seule et même parole.


Si la version de l'Exode dit  «souviens-toi» et la version de Deutéronome dit «observe», pourquoi, dans Lecha Dodi, place-t-on «observe» avant «souviens-toi» ? Ne penserait-on pas que la version d’Exode devrait précéder ? La disposition des mots dans Lecha Dodi ne reflète pas une grande idée théologique. Il s’agit plutôt d’une raison poétique: la disposition inversée est nécessaire pour composer un acrostiche en hébreu avec le nom du poète, Shlomo ha-Lévi (Alkabets) !


16 et 17 janvier 2015

The entire civilized world is appalled at the murderous attacks in France last week. 

Enormous numbers of people showed their disgust with terrorism by taking part in demonstrations on Sunday in Paris and on Monday in many German cities. The one in Paris, attended by foreign leaders including the German chancellor and the prime minister of Israel, was the largest and most prominent. 

Yet even in a smaller city like Hannover, where I happened to be on Monday, 17,000 people came out. This morning, still in Hannover, I passed by a French sign in a German window:“Nous sommes tous Charlie”.

The values of free speech and religion, which the terrorists attacked, are among the principle values of the Torah. 

The Torah teaches us the importance of speech, including argumentative speech (Abraham and Moses argue with God) and humorous speech (a language built on a system of three-letter roots intrinsically invites word play--even in the Bible). 

One of the roots meaning “speak”, D-B-R, gives us the Hebrew word for the Book of Deuteronomy (Dvarim, literally “speakings, words, things”) and the Ten Commandments (Asseret ha-dibrot). These same letters also from an unrelated word meaning “plague” (dever). The terrorists seek to replace the former with the latter. 

The Hebrew phrase Bo el Paro, “go to Pharaoh” (in order to give him a message), occurs most famously in next week’s parasha, parashat bo. But it also occurs this week. The biblical Pharaoh was the tyrant who oppressed and enslaved the Israelites in Egypt. Metaphorically “Pharaoh” can stand for any menacing force that threatens our lives and freedom.

This week millions of people delivered a message to Pharaoh. They said: we value free speech, we value the Jewish religion, we value the French republic -- and we will not stand by while they are plagued by people who reject humanity and who, in doing so, reject the Creator of humanity.

With sadness we remember the victims of these atrocities. 

May their memories be an inspiration and a blessing.


I look forward to seeing many of you at our next shabbat services on 16 and 17 January.



Vayéchev
(English text, see below)

La paracha Vayéchev nous raconte le commencement de l’histoire de Joseph. En vérité il s’agit ici de trois histoires: 1) de l’histoire de Joseph, 2) de l’histoire de Judah et Tamar, et 3) de la poursuite de l’histoire de Joseph qui commence avec son arrivée en Egypte. Ce qui connecte ces histoires les unes aux autres, c’est la thématique des relations familiales, en particulier fraternelles, de l’erreur et la responsabilité, et de la continuité historique du peuple d’Israël.

Le troisième de ces thèmes est celui qu’on peut identifier plus facilement. L’histoire de Joseph -- comment ses frères le trahirent en le vendant comme esclave et comment il arrive en Egypte -- c’est la préparation de l’histoire de la rédemption d’Egypte, ou le commencement de l'avènement de la liberté, que nous célébrons chaque année pendant la fête de Pessah. Ce thème se manifeste aussi dans l’histoire de Judah et Tamar, qui sont des descendants directs du Roi David.

L’erreur et la responsabilité sont partout : non seulement dans notre paracha, mais dans la Torah et la Bible généralement, et dans la vie. Nous faisons tous des erreurs; il faut en accepter la responsabilité et chercher à agir mieux la prochaine fois. C’est ce qu’on appelle, dans la terminologie religieuse, pécher et se repentir. C’est un thème principal de Yom Kippour. Certes, pour la plupart d'entre nous, nous ne commettons pas de fautes si graves comme celles que l'on lit dans cette paracha.

Nous voyons que les frères de Joseph le maltraitent en le saisissant, en discutant s’ils le tueraient ou seulement s'ils le vendraient, en le vendant, et finalement en mentant quand ils en parlent avec leur père, Jacob. Judah maltraite Tamar, sa belle-fille, en ne lui donnant pas son troisième fils comme troisième mari après la mort des deux premiers. Son obstination et la réaction de Tamar créent pour elle un danger de mort.

L’interruption de la grande histoire de Joseph avec la petite histoire de Judah et Tamar a lieu précisément à cause de ce thème unificateur. Quand Judah reconnait ses fautes devant elle, il montre le développement du caractère qui est nécessaire avant qu’il puisse prendre le rôle de meneur de ses frères plus tard devant Joseph en Egypte. C’est pour cela que la tribu de Judah devient la tribu israélite la plus importante, que nous nous appelons après lui en hébreu -- yehudim -- et que notre religion, c’est le judaïsme.

Enfin le thème des fratries, lui aussi, revêt une importance significative non seulement dans la Bible, mais aussi dans la réalité quotidienne. Joseph et ses frères sont les successeurs de Caïn et Abel, d’Isaac et Ishmaël, de Jacob et Esau. Cette histoire des frères contient elle-même une "sous-histoire" de frères avec elle-même sa propre "sous-sous histoire" de frères. C’est à dire que Judah, lui-même le quatrième des frères de Joseph, a trois fils, et que sa belle-fille Tamar à son tour en a deux. On ne peut pas éviter d'avoir des frères; il faut apprendre comment vivre avec eux.


Vayéchev

The story of Joseph begins in Parachat Vayeishev. We really have three different
stories here: the story of Joseph, the story of Judah and Tamar, and the continuation of the story of Joseph, beginning with his arrival in Egypt. These stories are connected to each other through the themes of family relationships (especially between brothers), mistakes and responsibility, and the continuation of the historical development of the People of Israel.

The last of these themes is the easiest to identify. The story of Joseph -- how his brothers betray him and sell him into slavery, and how he arrives in Egypt -- prepares the way for the story of the redemption from Egypt later on, which we celebrate every year during the festival of Passover. This theme is also present in the story of Judah and Tamar, who are direct ancestors of King David.
Mistakes and responsibility is a ubiquitous theme not only in this week’s parashah, but throughout the Torah and the Bible, as well as in real life. We all make mistakes; we need to accept responsibility for them and to seek to do better next time. This is called, to use religious terminology, sin and repentance. It is one of the main themes of Yom Kippur. To be sure, most of us do not mistakes as severe as the ones we read about in this parashah.

We see that Joseph’s brothers mistreat him by capturing him, by discussing whether to kill him or merely to sell him, by selling him, and finally by lying when telling their father, Jacob, what happened. Judah mistreats his daughter-in-law Tamar by not giving her his third son as a third husband after the death of the other two. His obstinance and her reaction puther in danger of being killed.

The larger story of Joseph is interrupted by the smaller story of Judah and Tamar precisely because of this unifying theme. When Judah acknowledges his mistakes in front of Tamar, he demonstrates a character development that must take place before he is ready to assume the role of leadership among his brothers later on in Egypt. This is why Judah became the largest of the Israelite tribes, why we take our Hebrew name from him -- Yehudim -- and why our religions is called Judaism.

Finally, the theme of brothers is important not only in the Bible, but in daily life.
Joseph and his brothers are the successors of Cain and Abel, Isaac and Ishmael, Jacob and Esau. This story of brothers contains a sub-story of brothers with its own sub-story of brothers: Judah, himself the fourth of Joseph’s brother, has three sons, and his daughter in law Tamar has two. We cannot avoid brothers; we have to learn how to live with them.




Toledot

La paracha Toldot prétend raconter l’histoire d’Isaac:  V’elatoldotYitzchakbenAvraham; Avrahamholid et-Yitzchak (Voilà l’histoire d’Isaac, le fils d’Abraham: Abraham a engendré Isaac; Gen. 25:19)
A part autres choses la parashat nous dit qu’Isaac avait 40 ans quand il s’est marié avec Rébecca, qu’il aimait son fils âiné Esau plus que son fils plus jeune, Jacob, parce qu’il aimait la viandeque Esau lui a cuite quand il revenait de la chasse, et qu’il voulait bénir Esau avant de mourir.
Quand même, la vue sur l’histoire d’Isaac va vite sur le reste de la famille: Esau, Jacob, et spécialement Rébecca. Tout d’abord il semble que la première description importante ,c’est l’histoire importante de Esau qui vend ses droits de naissance à Jacob, mais en fait, c’est une partie de l’histoire de la naissance des jumeaux. La vraie histoire commence avant que les enfants soient engendrés et nés. Rébecca est stérile, et Isaac prie pour elle.
Bien que la stérilité soit un motif commun dans la Thora – Sarah et Rachel étaient stériles d’abord aussi – le rôle de Rébecca est exceptionnel. Alors que Sarah riait de Dieu, et Rachel se dispute avec sa sœur, Rébecca se convertit à Dieu quand les jumeaux commencent à se battre dans son ventre.  Elle demande ce qui se passe, et Dieu lui explique qu’elle va avoir deux enfants qui vontdevenir deux nations.
Parmi les quatre femmes qui tiennent un matriarcat (Leah est la quatrième, si on considère aussi les employées de maison Bilha et Zilpa, il y en a six) c’est Rébecca qui montre une relation directe à Dieu. Ce n’est pas seulement à ce moment-là qu’elle s’adresse à lui, mais elle prend un rôle actif en dirigeant le destin de sa famille pour garantir que c’est Jacob qui va être l’héritier de Isaac, eet pas Esau. Elle voit que Jacob est plus capable d’être au service de Dieu et de continuer l’art de vivre que nous appelons «Judaïsme».
De son côté Esau se détourne de ses parents en se mariant avec deux femmes Hititte. Après avoir vendu ses droits de naissance, Esau «mangeait et buvait, il s’est levé et il est parti» (Gen.25:34). Conformément à la tradition juive, quand même, « on doit manger  et être satisfait, et louer Dieu…» Cette citation de Deut. 8:10 fait partie du Birkat ha-Mazon, la louange de Dieu après le repas. Au lieu de savourer son repas et de se montrer reconnaissant, Esau mange et s’en va.
En plus la chasse fait partie de sa vie, ce qui ne correspond pas non plus au Judaïsme. L’autre caractère biblique qui est révelé comme chasseur, c’est Nimrod (Gen. 10:8-9), bien qu’Yishmael soit un archer (Gen. 21:20). Les animaux qui sont tués par la chasse ne sont pas «cacher», ipso facto. Si la Thora nous dit que Isaac, contrairement à  Esau, habitait une tente, la Torah se rapporte à un des développements les plus importants de l’histoire du monde: la transition progressive de l’homme comme chasseur/collectionneur à l’homme comme agriculteur sédentaire.
Cette histoire nous montre  la personnalité de Esau. Le caractère le plus actif dans la «Parasha» quand même, c’est Rébecca. C’est elle qui est la première personne à remarquer les différences entre ses deux enfants. C’est aussi Rébecca qui met en mouvement la charade dans laquelle Jacob prétend  être Esau pour avoir la bénédiction de l’aîné par Isaac, qui est âgé et aveugle.

On ne sait pas si Isaak a été berné , ou s’il était d’accord en apparence parce que, lui aussi, savait ce qui serait la meilleure chose pour le futur du people juif, bien qu’il aimât la viande. Pour finir, c’est pour cela que nous sommes les enfants d’Israël (c’était aussi le nom de Jacob), mais pas les enfants de Esau.

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